Cours 6: Domaines de Scott
Dans une Catégorie Cartésienne Close (CCC)
- Hom interne:
- \[𝒞(Γ × A, B) ≃ 𝒞(Γ, \underbrace{A ⇒ B}_{= B^A \text{ : hom interne de la CCC}})\]
De plus:
\[1 × A ≃ A\]Pourquoi “hom interne”?
Soit $A ∈ 𝒞$:
- Point (élément) de $A$:
-
$a: 1 ⟶ A$
Propriété fondamentale de la sémantique dénotationnelle
\[M ≃_β N ⟹ ⟦M⟧_ρ = ⟦N⟧_ρ\]Donc
\[⟦M⟧_ρ = ⟦N⟧_ρ ⟹ ∀ρ', C \text{ contexte}; ⟦C[M]⟧_{ρ'} = ⟦C[N]⟧_{ρ'}\]Théorème de Böhm en $λ$-calcul: Si $M$ et $N$ sont $βη$-normaux:
\[M \neq N ⟹ ∃ C \text{ contexte}; \begin{cases} C[M] ⟶^\ast \texttt{TRUE} ≝ λx,y.x \\ C[N] ⟶^\ast \texttt{FALSE} ≝ λx,y.y \\ \end{cases}\]
Dans le cas du $λ$-calcul pur, on cherche $λ: D^D ⟶ D, @: D ⟶ D^D$ tq
-
$β$-contraction:
\[@ \circ λ = id_{D^D}\]
NB: Si on veut aussi la $η$-expansion:
-
$η$-expansion:
\[λ \circ @ = id_D\]
Retour aux fonctions Scott-continues
Remarque: Comme les fonctions continues sont déterminées par leurs valeurs sur un ensemble dense, tel que $ℚ ⊆ ℝ$:
\[\underbrace{\vert 𝒞^0(ℝ) \vert}_{= \vert ℝ^ℚ \vert = \vert ℝ \vert} ≃ \vert ℝ \vert\]Domaines de Scott
Compacité
Compacité d’un point ≃ point isolé d’une suite
- Point $d ∈ (D, ≤)$ compact:
-
ssi \(∀ Δ \text{ filtrant}, d ≤ ∨ Δ ⟹ ∃x ∈ Δ, d ≤ x\)
NB: Les points compacts correspondent à une quantité finie d’information (rappel: $⊥$: pas d’information): puisque si l’information de $d$ est contenue dans $∨ Δ$, alors il existe un rang fini à partir duquel on a cette information.
On pose
\[𝒦(x) ≝ \lbrace d ≤ x \mid d \text{ compact} \rbrace\]L’ensemble des compacts est filtrant (le sup de deux compacts est compact).
Ex de point non-compact:
Dans $ℕ ∪ \lbrace ω \rbrace$, la chaîne ascendante des entiers, ayant pour sup $ω$, $d = ω$ n’est pas compact:
- $d = ω ≤ ω$
- mais n’existe pas d’entier $n$ tel que $d = ω ≤ n$
Domaines de Scott
- $x, y∈D$ sont compatibles:
-
ssi il existe $z$ tel que $x, y ≤ z$
- Un cpo $(D, ≤)$ est un domaine de Scott:
-
ssi
- Pour tous $x, y ∈ D$ compatibles, $x ∨ y$ existe
- Algébricité: \(∀x ∈ D, x = \bigvee 𝒦(x)\)
Soit $f: (D, ≤) ⟶ (E, ≤)$ et soient $x ∈ D,\; e\text{ compact } ≤ f(x)$ ($e$ est un approximant fini de l’image de $x$).
On pose
\[apx_f(x, e) ≝ \lbrace d ∈ 𝒦(x) \mid e \text{ compact } ≤ f(d)\rbrace\]NB: on se rapproche de la notion de continuité: pour toute approximation finie de $f(x)$ a pour image réciproque une approximation finie de $x$.
Caractérisation des fonctions continues sur les compacts
Prop: Soient $D, E$ des domaines de Scott, et $f: D ⟶ E$.
$f$ est continue, i.e. $∀ Δ \text{ filtrant}$:
- $f(Δ)$ filtrant
- $∨ f(Δ) = f(∨ Δ)$
- \[∀x ∈ D, f(x) = \bigvee_{d ∈ 𝒦(x)} f(d)\]
- $f$ est monotone et \(∀ x∈D, e ∈ 𝒦(f(x)), apx_f(x, e) ≠ ∅\)
Preuve:
1) ⟹ 2)
\[f(x) = f\left(\bigvee_{d ∈ 𝒦(x)} d\right) = \bigvee_{d ∈ 𝒦(x)} f(d)\]2) ⟹ 3)
Monotonie:
Si $x ≤ x’$, alors $𝒦(x) ⊆ 𝒦(x’)$, et
\[f(x) = \bigvee_{d ∈ 𝒦(x)} f(d) ≤ \bigvee_{d ∈ 𝒦(x')} f(d) = f(x')\]Soit $e ∈ 𝒦(f(x))$. On cherche $d ∈ 𝒦(x)$ tel que $e ≤ f(d)$.
\[e ≤ f(x) = \bigvee_{d ∈ 𝒦(x)} f(d) \overset{\text{compacité de } e}{⟹} ∃d∈ 𝒦(x), e ≤ f(d)\]3) ⟹ 1)
La monotonie donne le caractère fibrant de $f(Δ)$ et l’inégalité $∨ f(Δ) ≤ f(∨Δ)$.
Montrons que $f(∨Δ) ≤ ∨ f(Δ)$: par algébricité, il suffit de démontrer:
\[𝒦(f(∨Δ)) ⊆ 𝒦(∨ f(Δ))\]Soit $e ∈ 𝒦(f(∨Δ))$. On sait qu’il existe $d ∈ apx_f(∨Δ, e) ≠ ∅$.
En particulier, $d ∈ 𝒦(∨ Δ)$, et par compacité: \(∃x ∈ Δ; d ≤ x\)
Donc
\[e ≤ f(d) \overset{\text{monot.}}{≤} f(x) ≤ \bigvee f(Δ)\]NB:
- donc les fonctions continues sont caractérisées par leurs valeurs sur les compacts.
Topologie de Scott
Scott-continuité ⟺ continues pour la topologie de Scott:
$O$ ouvert de Scott ssi
-
$O$ est clos par le haut:
\[x ∈ O, x ≤ x' ⟹ x' ∈ O\] -
$∀Δ \text{ filtrant}$:
Prop: Soient $(D, ≤), (E, ≤)$ des cpos. Alors $f: D ⟶ E$ est continue par rapport à la topologie de Scott ssi elle est Scott-continue (au sens défini précédemment).
A partir de maintenant, on va laisser tomber la topologie…. :-(
On va considérer des extensions qui ne vont prendre en compte que l’ordre des cpos.
Historiquement, on avait des modèles “trop gros”, contenant des fonctions continues n’étant l’interprétation d’aucun $λ$-terme.
Ex: considérer le cpo (fini, donc domaine de Scott)
$Bool$:
digraph {
rankdir=BT;
⊥ -> 1, 0;
}
On pose
\[\text{ou parallèle}≝ \begin{cases} Bool × Bool &⟶ Bool \\ (⊥,⊥) &\mapsto ⊥ \\ (⊥,1) &\mapsto 1 \\ (1,⊥) &\mapsto 1 \\ (⊥,0) &\mapsto 0 \\ (0,⊥) &\mapsto 0 \\ (0,0) &\mapsto 0 \\ \end{cases}\](les autres cas étant définis par monotonie)
Cette fonction ne peut être l’interprétation d’aucune $λ$-terme, parce qu’en $λ$-calcul, il y a toujours une dissymétrie (un argument qui domine sur l’autre).
Par contre, le ou séquentiel est implémentable par des $λ$-termes:
\[\text{ou séquentiel}≝ \begin{cases} Bool × Bool &⟶ Bool \\ (⊥,⊥) &\mapsto ⊥ \\ (⊥,1) &\mapsto ⊥ \\ (1,⊥) &\mapsto 1 \\ (⊥,0) &\mapsto 0 \\ (0,⊥) &\mapsto 0 \\ (0,0) &\mapsto 0 \\ \end{cases}\](deuxième ligne change)
On a donc cherché une sémantique plus “restreinte” qui rejette des fonctions comme le ou parallèle. Cette restriction est le déterminisme ⟶ on ne peut obtenir 1 que d’une seule manière avec le ou séquentiel.
- ⟹ Gérard Berry: $dI$-domains:
-
condition supplémentaire de stabilité, l’ensemble $apx_f(x, e) ≠ ∅$, a un minimum (qui correspond à l’information minimale qui nous conduit à l’approximation $e$)
Dans $dI$-domain:
- c’est un domaine de Scott
- il y a les infs
- $d$ pour distributivité
- propriété $I$: si $d$ est compact, alors $𝒦(d)$ est fini
Espaces cohérents (espaces de cohérence)
- Cas particulier des $dI$-domains.
- en anglais: coherence spaces (car coherent spaces déjà pris) ⟶ en fr: “espaces de cohérence”
- Un espace cohérent:
-
est une paire $A = (\vert A \vert, \sim_A)$ où:
- $\vert A \vert$ est un ensemble, dit trame
- $\sim_A ⊆ \vert A \vert × \vert A \vert$ est une relation réflexive et symétrique, dite cohérence.
- Une clique de $A$:
-
est un ensemble $x ⊆ \vert A \vert$ tq \(∀a, a' ∈ x, a \sim_A a'\)
Ex: $Bool ≝ (\lbrace 0, 1 \rbrace, 0 \sim_A 0, 1 \sim_A 1)$
On dénote par $Cl(A)$ l’ordre partiel des cliques de $A$ ordonnées par inclusion.
NB: les éléments de la trame sont dénotés par $a ∈ \vert A \vert$, les cliques par $x ⊆ \vert A \vert$
Prop: $Cl(A)$ est un $dI$-domain
Preuve:
Plus petit élément
$⊥ = ∅$
Sup filtrants
Si $Δ ⊆ Cl(A)$ filtrante: $∀x, x’ ∈ Δ, ∃ z ∈ Δ; x, x’ ⊆ z$.
- $\bigcup Δ$ est une clique (union des éléments de $Δ$).
- $a, a’ ∈ \bigcup Δ ⟹ ∃Δ \ni x \ni a, x’ \ni a’$
Lemme: les points compacts de $Cl(A)$ sont exactement les cliques finies.
Preuve:
Soit $d ∈ Cl(A)$ une clique finie, et $d ⊆ \bigcup Δ$ où $Δ ⊆ Cl(A)$ est filtrante. On vérifie que $d ⊆ x$, pour une clique $x ∈ Δ$.
Soit $d ∈ Cl(A)$ telle que $∀Δ \text{ filtrant}$,
\[d ⊆ \bigcup Δ ⟹ ∃ x ∈ Δ; d ⊆ x\]Prenons
\[Δ ≝ \lbrace e \mid e \text{ finie} ⊆ d \rbrace\]C’est filtrant, et $\bigcup Δ = d$ (en fait, c’est l’algébricité, qu’on démontre là).
Par hypothèse,
\[∃e ∈ Δ \text{ tq } d ⊆ e\]donc $d$ est finie.
On vérifie les autres propriétés aisément.
Catégorie des espaces cohérents
Soient $A, B$ des espaces cohérents.
Morphismes $f: A ⟶ B$ de la catégorie des espaces cohérents
Les morphismes sont les
- fonctions continues $f: A ⟶ B$:
-
i.e. les fonctions Scott-continues de $Cl(A)$ vers $Cl(B)$
Trace d’une fonction continue
Soient $x ∈ Cl(A), \; e ⊆_{\text{finie}} f(x)$
On sait que
\[apx_f(x, e) ≠ ∅\]i.e.
\[∃ \, d ⊆_{\text{finie}} x; e ⊆ f(d)\]On peut appliquer cela à $e ≝ \lbrace b \rbrace$, avec $b ∈ f(x)$.
\[∃ \, d ⊆_{\text{finie}} x; b ∈ f(d)\]NB: une clique peut être vue comme un ensemble d’informations cohérentes entre elles.
- Trace de $f$:
- \[tr(f) ≝ \lbrace (d, b) ∈ Cl_{finie}(A) × \vert B \vert \mid b ∈ f(d)\rbrace\]
La trace caractérise $f$, dans un domaine de Scott:
\[f(x) = \bigcup\limits_{d ⊆_{\text{finie}} x} f(d) = \lbrace b \mid ∃ \, d ⊆_{\text{finie}} x; \; (d, b) ∈ tr(f) \rbrace\]
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