Extension élémentaire commune, Amalgamation élémentaire, Applications élémentaires partielles

Teacher: Tomas Ibarlucia

Rappel: $T$ est $κ$-catégorique si $T$ a un seul modèle de cardinalité $κ$ à iso près.

Critère de Vaught

Vaught: Si $T$ est une théorie $κ$-catégorique, $κ ≥ \vert ℒ_{ω, ω} \vert$ sans modèle fini, alors $T$ est complète.

Preuve: $ℳ, 𝒩 ⊨ T$

Il existe $ℳ’ \succcurlyeq ℳ, \; 𝒩’ \succcurlyeq 𝒩$ avec $\vert ℳ’ \vert ≥ κ, \, \vert 𝒩’ \vert ≥ κ$.

Puis, il existe $ℳ’’ ≼ ℳ’, \; 𝒩’’ ≼ 𝒩’$ de card. $κ$.

Alors $ℳ’’ ≃ 𝒩’’$ par hypothèse, puis

\[ℳ ≡ ℳ' ≡ ℳ'' \overset{≃}{≡} 𝒩'' ≡ 𝒩' ≡ 𝒩\]

Théorème de l’extension élémentaire commune, et de l’amalgamation élémentaire:

  1. Si $ℳ_1 ≡ ℳ_2$, alors il existe $𝒩$ et des plongements élémentaires $ℳ_1 ⟶ 𝒩$ et $ℳ_2 ⟶ 𝒩$.

    1’: Si $(ℳ_i)_{i ∈ I}$ est une famille de structures élémentairement équivalentes, alors il existe $𝒩$ et des plongements élémentaires $ℳ_i ⟶ 𝒩$

  2. Si on a $ℳ_0, ℳ_1, ℳ_2$ et des plongements élémentaires $f_i: ℳ_0 ⟶ ℳ_i, \, i ∈ \lbrace 1, 2\rbrace$, alors il existe $𝒩$ et des plongements élémentaires $g_i: ℳ_i ⟶ 𝒩, \; i ∈ \lbrace 1, 2\rbrace$ tq $g_1 f_1 = g_2 f_2$

\[\begin{xy} \xymatrix{ & ℳ_0 \ar[ld]_{f_1} \ar[rd]^{f_2} & \\ ℳ_1 \ar@{.>}[rd]_{g_1} & & ℳ_2 \ar@{.>}[ld]^{g_2}\\ & 𝒩 & } \end{xy}\]

Preuve:

1.

Il suffit de voir que

\[Diag_{el}(ℳ_1) ∪ Diag_{el}(ℳ_2)\]

est satisfaisable ($ℒ_{ℳ_1} ∩ ℒ_{ℳ_2} = ℒ$)

On vérifie que chaque partie

\[T' = Diag_{el}(ℳ_1) ∪ \lbrace φ(c_{\overline{d}})\rbrace\]

est satisfaisable ($\overline{d} ∈ M_2^k$, $φ(c_{\overline{d}}) ∈ Diag_{el}(ℳ_2)$).

Comme $ℳ_2 ⊨ ∃ \overline{x} \, φ(\overline{x})$ (si $φ(\overline{d}) ∈ Diag_{el}(ℳ_2)$), alors $ℳ_1 ⊨ ∃ \overline{x} \, φ(\overline{x})$, disons $ℳ_1 ⊨ φ(\overline{b})$ pour un certain uplet $\overline{b} ∈ M_1^k$.

Alors \(({ℳ_1}_{M_1}, \underbrace{\overline{b}}_{\text{pour interpréter } c_{\overline{d}}})\) est un modèle de $T’$.

Donc $T$ admet un modèle $𝒩$. Les applications

\[\begin{cases} ℳ_1 &⟶ 𝒩 \\ m &⟼ c^{𝒩}_m \end{cases}\]

et

\[\begin{cases} ℳ_2 &⟶ 𝒩 \\ m' &⟼ c^{𝒩}_{m'} \end{cases}\]

sont des plongements élémentaires car $𝒩 ⊨ Diag_{el}(ℳ_1)$ (resp. $𝒩 ⊨ Diag_{el}(ℳ_2)$)

1’.

Soit \(T ≝ \bigcup\limits_{i ∈ I} Diag_{el}(ℳ_i)\)

toute partie $T_F = \bigcup\limits_{i ∈ F} Diag_{el}(ℳ_i)$ pour $F$ finie est satisfaisable par 1 + récurrence. Donc $T$ est satisfaisable, etc.

2.

$ℳ_0 \hookrightarrow ℳ_1$, $ℳ_0 \hookrightarrow ℳ_2$

Sans perte de généralité (qui à renommer les éléments de $ℳ_1$ et $ℳ_2$), on peut supposer

\[ℳ_0 ≼ ℳ_1 \qquad \text{ et } \qquad ℳ_0 ≼ ℳ_2\]

On considère $Diag_{el}(ℳ_i)$ dans le langage $ℒ_{ℳ_i}$ (pour $i ∈ \lbrace 1, 2\rbrace$), où $ℒ_{ℳ_1} ∩ ℒ_{ℳ_2} = ℒ_{ℳ_0}$.

Il suffit de voir que

\[T = Diag_{el}(ℳ_1) ∪ Diag_{el}(ℳ_2)\]

est satisfaisable, car ensuite on prend (si $𝒩 ⊨ T$):

\[g_i: \begin{cases} ℳ_i &⟶ 𝒩 \\ m &⟼ c^{𝒩}_m \end{cases}\]

et ce seront des plongements élémentaires qui satisfont, pour $m ∈ ℳ_0$,

\[g_1(m) = c^{𝒩}_m = g_2(m)\]

Donc il suffit de voir que

\[T' = Diag_{el}(ℳ_1) ∪ \lbrace \underbrace{φ(c_{\overline{a}}, c_{\overline{d}})}_{∈ Diag_{el}(ℳ_2)}\rbrace\]

où $\overline{a} ∈ ℳ_0^k$ et $\overline{d} ∈ (ℳ_2 \backslash ℳ_0)^k$

Comme $φ(c_{\overline{a}}, c_{\overline{d}}) ∈ Diag_{el}(ℳ_2)$, $ℳ_2 ⊨ ∃ \overline{x} \, φ(\overline{a}, \overline{x})$

Donc, comme $ℳ_0 ≼ ℳ_2$,

\[ℳ_0 ⊨ ∃ \overline{x} \, φ(\overline{a}, \overline{x})\]

Comme $ℳ_0 ≼ ℳ_1$,

\[ℳ_1 ⊨ ∃ \overline{x} \, φ(\overline{a}, \overline{x})\]

Disons $ℳ_1 ⊨ φ(\overline{a}, \overline{b})$. Alors $(ℳ_1, \underbrace{\overline{b}}_{\rlap{\text{pour interpréter } c_{\overline{d}}}})$ est un modèle de $T'$.

Chaînes de structures

Soit $I$ un ensemble totalement ordonné.

Une $I$-chaîne de $ℒ$-structures:

est une famille $(ℳ_i)_{i ∈ I}$ tq $ℳ_i ⊆ ℳ_j$ pour tous $i < j$

Si on a $ℳ_i ≼ ℳ_j$ pour tous $i < j$, alors c’est une $I$-chaîne élémentaire.

NB: si $(ℳ_i)$ est une $I$-chaîne, alors il existe sur $ℳ = \bigcup\limits_{i∈I} ℳ_i$ une unique $ℒ$-structure $ℳ$ telle que $ℳ_i ⊆ ℳ$.

\[R^ℳ = \bigcup\limits_{i ∈ I} R^{ℳ_i}\\ f^ℳ = \bigcup\limits_{i∈ I} f^{ℳ_i}\]

Lemme de la chaîne élémentaire de Tarski: Soit $(ℳ_i)_{i ∈ I}$ une $I$-chaîne élémentaire. Soit $ℳ ≝ \bigcup\limits_{i ∈ I} ℳ_i$. Alors pour tout $i$:

\[ℳ_i ≼ ℳ\]

Preuve: par récurrence sur la complexité de $φ$, on montre que pour tout $i ∈ I$ et $\overline{a} ∈ ℳ_i^n$, \(ℳ_i ⊨ φ(\overline{a}) \text{ ssi } ℳ ⊨ φ(\overline{a})\)

  • Si $φ$ est atomique, c’est parce que $ℳ_i ⊆ ℳ$ (la remarque)

  • Si $φ = ¬ ψ$ ou $φ = ψ \star χ$, où $\star ∈ \lbrace ∧, ∨, →, \leftrightarrow\rbrace$, c’est clair.

  • Si $φ(\overline{x}) = ∃ y \, ψ(\overline{x}, y)$, alors:

    • si $\overline{a} ∈ ℳ_i^n$ et $ℳ_i ⊨ φ(\overline{a})$, alors il existe $b ∈ M$ tq $ℳ_i ⊨ ψ(\overline{a}, b)$. Par HR, $ℳ ⊨ ψ(\overline{a}, b)$, et donc $ℳ ⊨ φ(\overline{a})$

    • si $\overline{a} ∈ ℳ_i^n$ et $ℳ ⊨ φ(\overline{a})$, alors il existe $b ∈ M = \bigcup\limits_{i} M_i$ tq $ℳ ⊨ ψ(\overline{a}, b)$. Soit $j ∈ I$ tq $b ∈ M_j$. On peut supposer $j ≥ i$. Alors par HR, $ℳ_j ⊨ ψ(\overline{a}, b)$. Donc $ℳ_j ⊨ φ(\overline{a})$

      Comme $ℳ_i ≼ ℳ_j$, on a aussi $ℳ_i ⊨ φ(\overline{a})$


Exemple: Si $(ℳ_i)_{i ∈ I}$ est une chaîne de sous-structures élémentaires de $ℳ$ ($ℳ_i ⊆ ℳ_j, \; ℳ_i ≼ ℳ$), alors la chaîne $(ℳ_i)_{i ∈ I}$ est élémentaire et $\bigcup\limits_{i∈ I} ℳ_i ≼ ℳ$.

En effet:

\[ℳ_i ⊆ \bigcup\limits_{i∈I} ℳ_i ⊆ ℳ\]

où $ℳ_i ≼ \bigcup\limits_{i∈I} ℳ_i$ et $ℳ_i ≼ ℳ$. Donc $\bigcup\limits_{i∈I} ℳ_i ≼ ℳ$ (fixer un uplet dans l’union: il est dans l’un des $ℳ_i$’s, puis conclure).

Application des chaînes élémentaires

Une application élémentaire partielle de $ℳ$ dans $𝒩$:

est une application $f: A ⟶ 𝒩$ où $A ⊆ M$ tq $∀ \overline{a} ∈ A^k, \; ∀ φ(\overline{x})$, on a \(ℳ ⊨ φ(\overline{a}) \text{ ssi } 𝒩 ⊨ φ(\underbrace{f(\overline{a})}_{\rlap{≝ \, (f(a_1), …, f(a_k))}})\)

Proposition: Si $f: (A ⊆ M) ⟶ 𝒩$ est une application élémentaire partielle de $ℳ$ dans $𝒩$, alors il existe $𝒩’$ tq $𝒩 ≼ 𝒩’$ et un plongement élémentaire $f’: ℳ ⟶ 𝒩’$ qui étend $f$.

On prend des enrichissements $ℒ_M$ et $ℒ_N$ avec $ℒ_M ∩ ℒ_N = ℒ$

  • $ℒ_M = ℒ ∪ \lbrace c_m \rbrace$
  • $ℒ_N = ℒ ∪ \lbrace b_n \rbrace$
\[T = Diag_{el}(ℳ) \, ∪ \, \lbrace b_{f(a)} = c_a \; \mid \; a ∈ A\rbrace \\ ∪ Diag_{el}(𝒩)\]

On veut montrer que $T$ admet un modèle $𝒩’$. Puis, on définira:

\[f': \begin{cases} ℳ &⟶ 𝒩' \\ m &⟼ c_m^{𝒩'} \end{cases}\]

($f’$ est élémentaire car $𝒩’ ⊨ Diag_{el}(ℳ)$)

Donc on aura pour $a ∈ A$,

\[f'(a) = c_a^{𝒩} = b_{f(a)}^{𝒩'} \underbrace{=}_{⊛} b_{f(a)}^{𝒩} = f(a)\]

$⊛$: $𝒩 ≼ 𝒩’$ car $𝒩’ ⊨ Diag_{el}(𝒩)$

Il suffit de voir que

\[T' \, ≝ \, Diag_{el}(ℳ) \, ∪ \, \lbrace \overbrace{φ(b_{f(a_1)}, …, b_{f(a_k)}, b_{n_1}, …, b_{n_l})}^{∈ \; Diag_{el}(𝒩)}\rbrace\\ ∪ \lbrace b_{f(a_i)} = c_{a_i} \; \mid \; i = 1, …, k \rbrace\]

est satisfaisable.

\[𝒩 ⊨ φ(b_{f(\overline{a})}, b_{\overline{n}})\\ 𝒩 ⊨ φ(f(\overline{a}), \overline{n})\\ 𝒩 ⊨ ∃ \overline{y}, \, φ(f(\overline{a}), \overline{y})\\\]

Comme $f$ est part. élémentaire,

\[ℳ ⊨ ∃ \overline{y} \, φ(\overline{a}, \overline{y})\\ ℳ ⊨ φ(\overline{a}, \overline{m})\]

$\widetilde ℳ ≝ (ℳ, \overline{a}, \overline{m})$ est un modèle de $T’$ ($\overline{a}$: pour interpréter $b_{f(\overline{a})}$, $\overline{m}$: pour interpréter $b_{\overline{n}}$)

\[b_{n_i}^{\widetilde ℳ} = m_i\\ b_{f(a_i)}^{\widetilde ℳ} = a_i\\\]

Proposition: Si $f: (A ⊆ M) ⟶ ℳ$ est une application élémentaire partielle, alors il existe $𝒩$ tq $ℳ ≼ 𝒩$ et $σ ∈ Aut(𝒩)$ tq $σ$ étend $f$.

Preuve: On définit $ℳ_0 = ℳ, \, f_0 = f$. On applique la proposition précédente pour obtenir $ℳ_1 \succcurlyeq ℳ_0$ et $f_1 \supseteq f_0$, $f_1: ℳ_0 ⟶ ℳ_1$ élémentaire.

Alors on peut voir $f_1$ comme une application élémentaire partielle de $ℳ_1$ dans $ℳ_1$.

\[f_1: \underbrace{ℳ_0}_{≼ ℳ_1} ⟶ ℳ_1\]

Ainsi de suite, on définit une chaîne élémentaire

\[ℳ_0 ≼ ℳ_1 ≼ ⋯\] \[f_0 ⊆ f_1 ⊆ ⋯\]

On n’a qu’à prendre

\[𝒩 ≝ \bigcup\limits_{i ∈ I} ℳ_i\\ σ ≝ \bigcup\limits_{i ∈ I} f_i\]

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