TIPE 2016 Transparents : Théorie des modèles

Ax-Grothendieck : démonstration algébrique

Nullstellensatz et Astuce de Rabinowitsch

Nullstellensatz faible et fort

Problématique et premiers outils

Théorème d’Ax-Grothendieck Toute fonction polynomiale de \(\mathbb{C}^n\) dans \(\mathbb{C}^n\) qui est injective est surjective.

Premières observations

  • Théorème de d’Alembert

  • Principe des tiroirs

Nullstellensatz faible Si \(\mathbb{K}\) est algébriquement clos (AC), pour tout idéal \(J\) de \(\mathbb{K}[X_1, \ldots, X_n]\), \(\hbox{V}(J)=\emptyset \Longrightarrow J = \mathbb{K}[X_1, \ldots, X_n]\)

\[\hbox{V}(J) {\overset{ {\text{déf}}}{=}}\bigcap\limits_{P \in J} P^{-1}\left(\{0\}\right)\] \[\Phi {\overset{ {\text{déf}}}{=}}\left\{ \begin{array}{cll} \mathbb{K}^n & \to & \big\{\text{Idéaux maximaux de } \mathbb{K}[X_1,\ldots, X_n] \big\} \\ (a_1, \ldots, a_n) & \mapsto & \hspace{3em} \big\langle X_1-a_1 , \ldots,\, X_n-a_n \big\rangle \end{array}\right.\]

est une bijection.

\(\bigg\Downarrow\) Astuce de Rabinowitsch

Nullstellensatz fort \(\mathbb{K}\) AC : pour tous polynômes \(P_1, \ldots, P_m \in \mathbb{K}[X_1, \ldots, X_n]\), l’idéal \(J {\overset{\text{déf}}{=}}\big\langle P_1 , \ldots,\, P_m \big\rangle\) vérifie : \(\hbox{I}\left(\hbox{V}(J)\right)=\sqrt{J}\)

  • \(\hbox{I}\left(\hbox{V}(J)\right)\) est l’idéal des polynômes s’annulant en chacun des éléments de \(\hbox{V}(J)\)

  • \(\sqrt{J}\) est le radical de \(J\) (l’ensemble des polynômes dont une puissance strictement positive appartient à \(J\))

Astuce de Rabinowitsch

Le Nullstellensatz faible implique le fort !

   Soit \(J {\overset{ {\text{déf}}}{=}}\big\langle P_1 , \ldots,\, P_m \big\rangle \subset \mathbb{K}[X_1, \ldots, X_n]\).

  • \(\sqrt{J} \subset \hbox{I}\left(\hbox{V}(J)\right)\) : évident, par intégrité de \(\mathbb{K}\).

  • \(\hbox{I}\left(\hbox{V}(J)\right) \subset \sqrt{J}\) : Si \(P \in \hbox{I}\left(\hbox{V}(J)\right)\backslash\{0\}\) : \(\mathfrak{I} {\overset{ {\text{déf}}}{=}}\big\langle 1 - X_0 P, \, P_1 , \ldots,\, P_m \big\rangle\)   \(\hbox{V}(\mathfrak{I}) = \emptyset \overset{ \text{Nullstellensatz faible}}{\Longrightarrow} \mathfrak{I} = \mathbb{K}[X_0,\, X_1, \ldots, X_n]\)    d’où : \(\hspace{-13 mm} 1 = (1 - X_0 P) \, \underbrace{Q_0(X_0, \ldots, X_n)}_{\in \mathbb{K}[X_0,\, X_1, \ldots, X_n]} + \sum \limits_{i=1}^m P_i \, \underbrace{Q_i(X_0, \ldots, X_n)}_{\in \mathbb{K}[X_0,\, X_1, \ldots, X_n]}\)     

    \(\bigg\Downarrow\) \(X_0 \leftarrow 1/P\)

    \(1 = \sum \limits_{i=1}^m P_i(X_1, \ldots, X_n) \, Q_i(1/P, \, X_1, \ldots, X_n)\) soit, pour \(r\) assez grand : \(P^r = \sum \limits_{i=1}^m P_i(X_1, \ldots, X_n) \, \underbrace{ {\widetilde Q_i}(X_1, \ldots, X_n)}_{\in \mathbb{K}[X_1, \ldots, X_n]} \in J\)

Ax-Grothendieck

Ax-Grothendieck

Plan de la démonstration

Heuristique : procéder par l’absurde, en considérant \(P : \mathbb{C}^n \to \mathbb{C}^n\) injectif mais non surjectif

  1. <1-> Le démontrer dans les clôtures algébriques des corps finis

    • Le Nullstellensatz fort \(\longrightarrow\) fournit des “témoins” de l’injectivité et de la non surjectivité de \(P\)
  2. <2-> Étendre le résultat à \(\mathbb{C}\), en exhibant une clôture algébrique de corps fini où Ax n’est pas vérifié.

\[\forall x,y \in \overline{\mathbb{K}}^n, P(x) - P(y) = 0 \Longrightarrow x - y = 0\]

\(\bigg\Downarrow\) Nullstellensatz fort + $$i$$-ème coordonnée

\(X_i-Y_i \in \sqrt{\big\langle P_i(X_1, \ldots, X_n)-P_i(Y_1, \ldots, Y_n) \big\rangle}\) \(\Rightarrow\) il existe \(Q : \overline{\mathbb{K}}^n \times \overline{\mathbb{K}}^n \to \overline{\mathbb{K}}^n\), \(r \in \mathbb{N}^*\) tels que : \(\forall x,y \in \overline{\mathbb{K}}^n, \, \, \big(P(x)-P(y)\big)Q(x,y) = (x-y)^r\)

Ax à l’épreuve de la théorie des modèles

Ax à l’épreuve de la théorie des modèles

Prélude : Schéma de Vérité de Tarski

Tout commence avec le constat, faussement trivial : “Il neige” est vrai si, et seulement si il neige.

Pour \(i \in \mathbb{N}\), on se donne des “ensembles de symboles” (dits langages) \(\mathcal{L}_i\) et \(\mathcal{L}_{i+1} \supsetneq \mathcal{L}_i\). On se place sur un \(\mathcal{L}_i\)-système formel (ex : logique du premier ordre) :

  • \(\mathcal{L}_i\) est appelé Langage-Objet

  • \(\mathcal{L}_i\) contient (éventuellement) un prédicat de vérité “\(\text{vrai}_i\)”

Schéma de vérité de Tarski : Pour tout \(\mathcal{L}_i\)-énoncé \(p\) : \(p\) est \(\text{vrai}_{i+1}\) ssi \(I_{i+1}(p)\)

où : \(I_{i+1}(p)\) est l’interprétation de p dans le \(\mathcal{L}_{i+1}\)-système formel

:

\(\mathcal{L}\)-structure

: Un ensemble \(\mathcal{M}\) où on interprète les éléments de \(\mathcal{L}\) : i.e on choisit

  • \(c^{\mathcal{M}}\) pour chaque symbole de constante \(c \in \mathcal{L}\)

  • ET \(f^{\mathcal{M}} : \mathcal{M}^{n_f} \to \mathcal{M}\) pour chaque symbole de fonction \(f \in \mathcal{L}\) d’arité \(n_f\)

  • ET \(P^{\mathcal{M}} \subset \mathcal{M}^{n_P}\) pour chaque symbole de prédicat \(P \in \mathcal{L}\) d’arité \(n_P\)

On interprète, ainsi, les \(\mathcal{L}\)-formules atomiques closes, puis les \(\mathcal{L}\)-énoncés de manière “usuelle” à partir des formules atomiques, par induction.

Modèle

: \(\mathcal{M}\) est un modèle de l’énoncé \(\theta\) si, et seulement si, \(\theta\) est vrai dans \(\mathcal{M}\) : on note \(\mathcal{M} \vDash \theta\)

Satisfaisabilité

: une théorie \(\mathcal{T}\) est dite : satisfaisable si elle admet au moins un modèle, finiment satisfaisable si toute partie finie de \(\mathcal{T}\) est satisfaisable.

Conséquence sémantique

: on dit qu’un énoncé \(\theta\) est une conséquence (sémantique) d’une théorie \(\mathcal{T}\) si : pour tout modèle \(\mathcal{M}\) de \(\mathcal{T}\), \(\mathcal{M} \vDash \theta\). On le note \(\mathcal{T} \vDash \theta\).

Filtres, Ultrafiltres, et Ultraproduits

Filtres, Ultrafiltres, et Ultraproduits

Ou comment concrétiser la notion “limite” de modèles

Filtre

: un filtre \(\mathcal{F}\) sur un ensemble \(I\) est une partie de \(\mathcal{P}(I)\) vérifiant :

  • \[\emptyset \not\in \mathcal{F}\]
  • \[\forall X \in \mathcal{F}, \forall Y \in \mathcal{P}(I), \, Y \supset X \Longrightarrow Y \in \mathcal{F}\]
  • \[\forall X, Y \in \mathcal{F}, \, X \cap Y \in \mathcal{F}\]
Ultrafiltre

: un filtre maximal (pour l’inclusion).

Ultrafiltres : remarque qualitativeIntuitivement, un ultrafiltre correspond à la donnée des “grandes” parties de \(I\), de telle sorte que toute partie est soit “grande” (\(\mathcal{U}\)-presque sûre) soit “petite” (\(\mathcal{U}\)-négligeable) : l’“opposé” de son complémentaire.

Égalité $$\mathcal{U}$$-presque partout On définit, sur \(\prod_{i \in I} \mathcal{M}_i\), une relation d’équivalence d’“égalité \(\mathcal{U}\)-presque partout” par : \(\forall M, N \in \prod_{i \in I} \mathcal{M}_i\), \(M \overset{\mathcal{U}{\text{-pp}}}{=} N \, \, \iff \, \, \{i \in I \mid \, M_i = N_i \} \in \mathcal{U}\)

Ultraproduit

: L’ultraproduit \(\mathcal{M}^{*}\) des \(\mathcal{M}_i\) (\(i \in I\)) par l’ultrafiltre \(\mathcal{U}\) est le quotient de \(\prod_{i \in I} \mathcal{M}_i\) par la relation d’équivalence \(\overset{\mathcal{U}{\text{-pp}}}{=}\). On le note \(\prod_{i \in I} \mathcal{M}_i \Big/ \mathcal{U}\).

Théorème de Łoś Une formule est vraie dans un ultraproduit si, et seulement si, elle est vraie en presque toutes coordonnées : Si \(\mathcal{M}^* {\overset{ {\text{déf}}}{=}}\prod_{i \in I} \mathcal{M}_i \Big/ \mathcal{U}\) est un ultraproduit de \(\mathcal{L}\)-structures, \(\phi(x_1, \ldots, \, x_n)\) une \(\mathcal{L}\)-formule, et \(M^* = \left(\overline{M^{(1)}}, \ldots, \, \overline{M^{(n)}}\right) \in {\left(\mathcal{M}^*\right)}^n\), alors : \(\mathcal{M}^* \vDash \phi(M^*)\) \(\iff \{i \in I \mid \, \mathcal{M}_i \vDash \phi\left(M^{(1)}_i, \ldots, \, M^{(n)}_i \right) \, \} \in \mathcal{U}\)

Théorèmes de Compacité et de Transfert

Théorèmes de Compacité et de Transfert

Théorème de Compacité Une théorie est satisfaisable si et seulement si elle est finiment satisfaisable.

Les $$\mathbb{F}_p$$ “tendent” vers $$\mathbb{C}$$ Pour tout \(P \subset \mathbb{P}\) infini, et tout ultrafiltre non principal \(\mathcal{U}\) sur \(P\) : L’ultraproduit de la famille des clôtures algébriques des \(\left(\mathbb{F}_p\right)_{p \in P}\) est isomorphe à \(\mathbb{C}\).

Théorème de Transfert Toute théorie \(\mathcal{T}\) du langage des anneaux est vraie dans \(\mathbb{C}\) dès qu’elle est vraie dans les clôtures algébriques des \(\mathbb{F}_p\), pour une infinité de nombres premiers \(p\).

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